Je suis un beatmaker, ça veut dire que je suis un compositeur ?

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L’activité de beatmaking s’est largement démocratisée en France ces dernières années, grâce à l’accessibilité des outils pour le pratiquer et à la force de frappe que permettent les réseaux sociaux. 

Au point où ce phénomène brouille les contours de ces compétences, souvent confondues avec celles des producteurs de musique. Pourtant, déterminer son rôle dans l’industrie musicale est nécessaire pour connaître ses droits, et donc se savoir ce qui t'est dû.

Spoiler : oui, si tu es beatmaker, tu composes de la musique. On préfère te le dire tout de suite, comme le métier n’est pas systématiquement bien cadré, donc payé, quand un projet musical prend forme. Pour mettre les points sur les i, on te propose un focus sur le rôle de beatmaker et ses origines, afin de clarifier ensuite ses liens et différences avec les métiers de composition et production, puis comment être payé pour la création de beats. 

D’où vient le beatmaking ?

Les termes beatmaking et beatmaker apparaissent aux États-Unis à peu près en même temps que le rap à la fin des années 1970s. Même si depuis tous les genres ont recours à ces compétences, elles sont intimement liées à ce genre.

Un morceau de rap consiste en une boucle rythmique, c’est-à-dire la répétition en continu d’un bout de titre, sur laquelle on pose les paroles ou flow de l’interprète. Cette boucle est créée à partir d’un sample, un son capturé ailleurs et cuisiné à une nouvelle sauce jusqu’à devenir la partie instrumentale d’un morceau neuf, le beat

Le travail ainsi accompli est mené par les beatmakers, capables de fabriquer du neuf avec de l’ancien, de composer un instru sans instrument ni formation de solfège classique. Par exemple, l’instrumental de « Rapper’s Delight », morceau phare du Sugarhill Gang sorti en 1979, est tiré de la ligne de basse du titre « Good Times » de Chic de la même année.

La progression du rôle de beatmaker fait écho à celle de ses outils et inversement : de la boîte à rythmes à la groovebox, en passant par les logiciels et les échantillonneurs, c’est la maîtrise de ces moyens de création qui définit les compétences de beatmaker et celles-ci dessinent de nouveaux besoins auxquels les technologies répondent.

Comme ils permettent d’exploiter des extraits de piano, synthétiseur, guitare et autres instruments de musique, ces outils (hardware et software) rapprochent justement les beatmakers qui les utilisent des compositeurs classiques formés au solfège. 

Le beatmaking est issu du rap et consiste à l’origine à créer un instrumental ou beat, en reprenant des rythmes existants pour en créer de nouveaux (sampling ou échantillonnage en français). Il partage son histoire avec ce genre, mais aussi avec les évolutions techniques des outils qui permettent sa pratique.

C’est quoi exactement un beatmaker ?

Finalement, il suffit de traduire littéralement la sémantique pour comprendre le terme. Beat vient de l’anglais et veut dire « rythme » tandis que maker signifie « créateur ». On obtient donc « créateur de rythme » qui décrit bien le rôle : le beatmaker conçoit l’instrumental d’un morceau de musique. C’est lui qui crée et agence les éléments qui le composent. On considère alors qu’il est compositeur, même si ça n’est pas toujours un statut valorisé par l’industrie de la musique.

Pourquoi cette dévalorisation ? Premièrement, le sampling était d’abord perçu comme du vol dans le métier et par les organisations de gestion collective des droits d’auteur. Elles ont donc pris longtemps à adapter leurs règles et reconnaître le beatmaking comme de la composition mélodique. Ensuite, il n’est pas nécessaire de savoir faire du solfège pour maîtriser les outils tech de composition musicale. Cette nuance invite parfois les acteurs, en dehors du rap, à estimer que les beatmakers sont moins compétents que les compositeurs à la formation instrumentale plus classique. 

Ceci dit, le métier est de plus en plus valorisé en France et les beatmakers trouvent désormais leur place au cœur des conversations des fans de rap. On pense à Skread qui crée des beats pour Orelsan et Le Motif qui bosse avec Niska, Booba ou encore PLK.

Il est aujourd’hui possible de faire carrière en tant que beatmaker, des compétences valorisées au point où des beatmakers invitent à leur tour des rappeurs à collaborer à leur projet. La preuve avec Myth Syzer et ses projets Bisous et Bisous mortels où on retrouve non seulement Ichon et Hamza, mais aussi Doc Gynéco et Roméo Elvis. Pareil pour son acolyte Ikaz Boi qui sort Brutal et Brutal 2 avec les voix d’Ateyaba, 13 Block, Damso ou encore Leto. 

Bon à savoir : il existe aussi des beatmakers qui se font connaître grâce à des type-beats, autrement dit des beats dont le titre indique de quel style d’artiste la création s’inspire. C’est ainsi que RJacksProdz et Masta se font connaître avant de collaborer avec Kaza et Naps.

Le beatmaker conçoit l’instrumental d’un morceau de musique et est donc compositeur. Si tu as ce rôle, il est important de clarifier ton statut en amont d’un projet de création collaborative pour protéger tes droits.

Je suis beatmaker, compositeur ou producteur ?

Pour t'aider, on te donne un portrait rapide de chaque rôle et on te répète encore que l’essentiel afin que tout se déroule bien lors d’un projet, c’est de communiquer à propos de tes fonctions auprès de tes collaborateurs. 

Les beatmakers composent l’instrumental d’un morceau, généralement de rap. Leur rôle peut consister aussi à l'arranger avec des effets sonores, de nouveaux choix d’instruments, etc. Conclusion, beatmakers = compositeurs.

Entre les anglicismes et le jargon musical, les rôles de beatmaker et producteur sont souvent confondus. En France, il existe deux types de producteurs : 

  • Le producteur aussi appelé directeur artistique, qui chapeaute la création d’un morceau de A à Z en supervisant tous les métiers créatifs qui y participent. En gros, il gère ce qui se passe en studio d'enregistrement.
  • Le producteur aussi appelé producteur exécutif, responsable des financements et de la promotion de l'œuvre musicale. Lui s’occupe de ce qui arrive en dehors du studio.

Il n’est pas impossible qu’une personne cumule ces rôles avec celui de beatmaker, ce qui est d’ailleurs souvent le cas aux États-Unis.

Un beatmaker est un compositeur de morceaux de rap ; Un producteur ou directeur artistique chapeaute les personnes qui travaillent en studio à une œuvre collaborative ; Un producteur de musique finance les frais de création et de promotion de l’œuvre. Aussi, une même personne peut occuper plusieurs de ces postes.

Comment je suis payé pour mes beats ?

Encore une fois, ça dépend des situations. Généralement, un beatmaker met son travail en ligne quand il débute (beats libres de droits),  les vend directement à un artiste (beats sous licence exclusive ou non exclusive) ou suite à une commande (beats sur mesure). Dans tous les cas, le beatmaker est au départ propriétaire de son instru, son master. Pour t’expliquer, on se base sur les licences proposées par la plateforme All-Beats.com où tu peux vendre tes beats (au prix de ton choix) ou en acheter.

Quand les beats sont gratuits et libres de droits, les personnes qui l’utilisent ne peuvent pas les commercialiser, diffuser en dehors d’internet, modifier, sampler, réarranger. Il n’y a pas de cession de droits musicaux ni d’échange financier.

Si les beats sont sous licence exclusive, le beatmaker les cède à un utilisateur unique qui le compense pour l’exploitation commerciale de son master avec un forfait et sur une durée limitée par celle des droits d’auteur. L’utilisateur ne devient pas pour autant propriétaire du master et ne peut pas utiliser les beats en les laissant intacts, il doit les intégrer à un nouveau morceau. Ce contrat concerne l’usage des beats à la télévision, à la radio, lors de concerts, pour enregistrer un morceau vendu ensuite en stream ou sur support physique. Bref, tout sauf la synchro en ligne

Si les beats sont sous licence non exclusive, le principe est le même, mais ils peuvent être vendus à plusieurs personnes. Dans ces deux cas, les beatmakers peuvent accéder à leurs redevances en tant que co-compositeur, ça dépend du contrat de licence dont il convient avec l’utilisateur.

Ensuite, il y a les beatmakers à la carrière plus mature, dont le travail fait l’objet de commande. Dans les cas où les beats sont créés sur mesure, c’est-à-dire commandés pour servir d’instrus à des morceaux, l’utilisateur du master paie pour en devenir propriétaire. Quand un beat est utilisé ainsi son beatmaker devient le compositeur (ou co-compositeur) de ce même morceau. À ce titre, il touche une partie des droits d’auteur générés par la commercialisation du morceau final. Pour y accéder, il est adhérent d’une Entité de Gestion Indépendante comme Bridger ou d’un Organisme de Gestion Collective et on t’en parle en détail ici

Un beatmaker met son travail en ligne quand il débute (beats libres de droits et parfois gratuits), ou le vend directement à un artiste (beats sous licence exclusive ou non exclusive) contre un forfait et des droits d’auteur en tant que co-compositeur selon le contrat de licence, ou parfois suite à une commande (beats sur mesure) où il est crédité comme compositeur. Dans tous les cas, le beatmaker est au départ propriétaire de son instru et il faut négocier en amont son forfait et la proportion de ses droits de compositeur versus la totalité des droits d'auteur pour se protéger financièrement.

Qu’est-ce que je dois retenir sur le sujet ?

Le beatmaking étant issu du rap, le beatmaker est à l'origine un compositeur de chansons de rap. Souvent confondu avec le producteur, le beatmaker en est un si, en plus, il accompagne et supervise les autres collaborateurs en studio, que ce soit sur le plan artistique ou financier. Il existe différentes façons de vivre du beatmaking - soit en créant ses propres projets, soit en vendant ses beats/type-beats sous différentes licences.

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